Émilie : mon parcours en tire-allaitement exclusif (TAE)

Après 14 mois et des poussières, j’ai allaité pour la dernière fois. Mon parcours d’allaitement n’a jamais été un long fleuve tranquille, au contraire!

Depuis toujours, j’idéalisais l’allaitement, ce geste naturel que tant de femmes pratiquent chaque jour, c’est tellement normal et facile! Lorsque j’étais enceinte, j’ai quand même participé à deux rencontres prénatales sur l’allaitement afin d’être mieux préparée. Juste au cas où..! Mes attentes étaient très élevées et c’était un besoin pour moi de faire ça pour ma fille.

Quelle ne fut pas ma surprise quand elle a refusé de s’accrocher à mon sein la première fois, puis toutes les fois suivantes! J’étais à l’hôpital, le post-partum ne se passait pas du tout comme je l’avais imaginé, mon allaitement non plus, je vivais de la détresse et par-dessus tout; je me sentais rejetée par ma fille d’à peine quelques heures.

Dès la première semaine, j’ai rencontré une consultante en allaitement, j’ai fait la demande pour avoir une marraine d’allaitement et on a eu un rendez-vous en ostéopathie pour bébé. Je voulais que ça marche et j’étais prête à tout. Au fil des suivis, j’ai appliqué la majorité des conseils donnés par les diverses intervenantes et mon allaitement s’est amélioré! Toutefois, les mises au sein, elles, ne se sont pas améliorées. Malheureusement, je me suis rendue à l’évidence que ça me faisait vivre trop d’émotions négatives (rejet, échec, tristesse) et ça me pesait énormément. C’est ainsi que le tire-allaitement exclusif (TAE) s’est installé chez nous!

Au fond, tout ce dont ma fille avait besoin, c’est du lait, de l’amour et des parents heureux. J’ai réalisé que le plus important au final, c’était que ma fille boive mon lait maternel peu importe la façon. J’ai la chance d’avoir un conjoint extrêmement présent et impliqué, car le TAE demande énormément de temps dans les premières semaines. J’ai pensé arrêter souvent, car je trouvais que je passais plus de temps en tête à tête avec mon tire-lait plutôt qu’avec ma fille directement, mais je me rappelais que je travaillais pour elle. Aujourd’hui, je peux affirmer que c’était le meilleur choix pour notre famille. Mon chum et ma fille ont développé une excellente complicité de par tous les boires qu’ils ont passés ensemble et j’ai toujours pu aller à mes rendez-vous ou faire des courses seule.

LA chose que j’ai trouvé le plus difficile dans mon parcours, c’est le gaspillage de lait à l’occasion. Malheureusement, c’est pratiquement inévitable en TAE car on n’a aucune garantie sur la faim de bébé lorsqu’on prépare un boire. Pour des raisons de santé, le lait maternel entamé n’est pas bon à l’infini, il faut donc se résoudre à en jeter. On peut toujours en repasser dans le bain ou dans des recettes pour bébé, mais dans mon cas, je n’éprouvais pas la même satisfaction que si ma fille le buvait.

Malgré les embûches, noter ici les mastites, les ampoules, les canaux bloqués, les nombreux sacrifices et le gaspillage, je sais que je retire beaucoup plus de positif. Le TAE m’a permis de rencontrer d’autres femmes merveilleuses chez Chantelait, qui vivaient elles aussi des défis par rapport à leur allaitement. J’ai d’ailleurs décidé de devenir bénévole pour pouvoir accompagner des mamans à mon tour. J’ai aussi été victime d’un beau problème! Je produisais trop de lait par rapport aux besoins de ma fille! J’ai donc été en mesure de donner à la banque publique de lait maternel d’Héma-Québec pour les grands prématurés, ainsi qu’à une maman atteinte d’un cancer du sein dans mon entourage. Je sais que je contribue à faire la différence dans la vie d’autres parents, et ça, c’est un des meilleurs sentiments du monde. Toute cette aventure m’a fait découvrir que je suis une personne plus persévérante et résiliente que tout ce que j’aurais imaginé. Merci ma fille, de m’avoir permis de vivre tout ça.